La Peur

La Peur

La peur au théâtre


La peur au théâtre

Bien que plus connue au cinéma, la peur s'exprime aussi au théâtre. Comme à l'écran, les effets sonores et les jeux de lumières permettent de créer un climat oppressant et angoissant. Dès l'Antiquité, les tragédies devaient provoquer l'effroi chez le spectateur – notons Scédase ou l'Hospitalité violée d'Alexandre Hardy (1604) inspiré de Plutarque, qui traite du viol et du meurtre de deux jeunes filles, mais ce n'est vraiment qu'à partir de la fin du XIXe siècle que la peur apparaît comme un thème important au théâtre. Des courants comme l'expressionnisme (vision émotionnelle et subjective de la réalité, se caractérisant par une esthétique violente et tourmentée), l'existentialisme (l'homme est libre est responsable de ses choix; réflexion sur son essence et son existence) et le théâtre de l'absurde (rejet des codes théâtraux; thématiques de l'absurdité des hommes, du monde, de la vie et des difficultés de  communication; intrigues et personnages dénués de sens) au XXe siècle commencent alors à l'exploiter et à la mettre en scène.

Le théâtre de la peur repose beaucoup sur l'implicite, comme le récit ou le hors-scène: les morts des personnages étaient, par exemple, dans les tragédies classiques, rapportées et non montrées (mort d'Hippolyte dans le Phèdre de Racine). Certains dramaturges choisissent néanmoins de représenter explicitement l'horreur, que la mise en scène renforce encore. La peur s'exprime souvent au travers de l'« inhumain », les situations et les actes sont exposés dans toutes leurs violences, tels « jetés à la face » du spectateur. Les thèmes récurrents sont « les exclus » (marginaux, rejetés par la société) dans leurs comportements véritables – au contraire du naturalisme qui tendaient à les rendre « sympathiques » (ex: œuvres d'Emile Zola, Victor Hugo,...) - comme les meurtres, la mutilation, le viol. Ce théâtre a souvent une visée critique et didactique, tel un miroir grossissant de notre société. Purifiés et Anéantis de Sarah Kane (1998 et 1995) traitent par exemple de la guerre, de la ritualisation de la violence et du cannibalisme, tandis que Tueur sans gages d'Eugène Ionesco (1958), sous la forme d'une utopie qui se mue en dystopie, dénonce la gratuité des meurtres et leur absurdité. La Grande et la Petite Manoeuvre d'Arthur Adamov (1950) désigne le totalitarisme et Fin de Partie de Samuel Beckett (1957) nous montre l'infirmité, la vieillesse et la difficulté de communication entre les êtres. De nombreuses pièces encore traitent de l'horreur et de la peur. Ce théâtre a, outre sa dimension dénonciatrice, une fonction cathartique, comme les films de même sorte au cinéma. On se fait peur pour s'en libérer. Mais la mise en scène pose parfois problème. Bien que nous ne soyons pas au XVIIe siècle, et que la règle de bienséance (ne pas choquer le spectateur) ne soit plus d'actualité, certaines mises en scène sont souvent remises en cause. La question que se posent les metteurs en scène, en particulier sur des pièces traitant de la peur et de la violence est “Que puis-je montrer?” et “Jusqu'où puis-je aller?”. La question peut ensuite s'étendre aux spectateurs; que sommes-nous prêts à voir?

 

 

 

 

 


31/01/2016
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